Le 28 octobre dernier le
quotidien israélien Haaretz indiquait
que Shaul Mofaz, Ministre israélien de
la Défense, avait donné l’ordre aux
forces de sécurité de faire partir d’ici la
fin de l’année 15 familles installées
depuis quatre ans dans les halles du
marché de gros [1].
Quelques jours plus tard, on assistait à
la mise en place d’un nouveau portail
métallique en bas de la rue menant de
la colonie de Ousama School/Beit
Romano à la place de l’ancienne mairie
fraîchement rebitumée, à l’entrée
du souk, juste derrière la tourelle d’observation
fraîchement habillée de fausse
pierre, souci évident de l’intégrer dans
l’environnement...
Dans le même temps, les marchands
palestiniens ambulants de fruits et
légumes étaient autorités à réinstaller
leurs étals dans la rue Shallaleh menant
au souk, interdite à la circulation depuis
septembre 2000 et dont la majorité des
magasins étaient fermés. Les taxis, quant
à eux, ont réapparu dans la rue perpendiculaire,
rendant
ainsi une certaine animation
à ce quartier
sinistré.
« ça s’arrange ! » me
dit un visiteur qui se
souvenait avoir
arpenté la ville morte en avril dernier.
Il s’agit, en fait, de la mise en place
d’un système qui laisse peu de place à
l’optimisme : la reprise d’une certaine
activité commerciale et la relative amélioration
de circulation dans cette zone
se fait parallèlement à l’installation d’un
dispositif de surveillance comportant
caméras, détecteurs électroniques, points
de contrôle et obstacles, visant à ceinturer
le coeur de la vieille ville et à le séparer
des poches où sont installées les
colonies.
Vider la zone colonisée de ses habitants
palestiniens et veiller à ce que les
colons ne pénètrent pas là où les Palestiniens
restent présents semble donc
bien être l’objectif des autorités israéliennes.
Les colons de la ville sont opposés
à toute matérialisation de la séparation
: comme ailleurs il ne faut pas
préjuger de l’avenir...La plupart espère
toujours « récupérer » toute la vieille
ville. Pas de mur prévu donc mais deux
sortes de ghettos qui se jouxtent.
Le calendrier politique des mois à venir
aura sans doute des conséquences sur
le sort de la ville. La décision de faire
partir - et pour aller où ? - les quinze
familles de colons des halles ne constituera
sans doute pas une priorité pour
le ministre de la Défense sortant. Les dirigeants
de la « Communauté Juive
d’Hébron » ont bien sûr entamé une
campagne auprès de certains députés
et ministres du Likoud. Ils espèrent
maintenant que les prochaines élections
israéliennes « empêcheront l’application
de ce décret démoniaque ».
En attendant des jours meilleurs, les
ânes continueront de jouer les livreurs
et les charrettes des marchands ambulants
ont encore de beaux jours devant
elles et il faudra toujours compter 47
minutes à une ambulance pour pouvoir
évacuer un malade de la zone [2].
Chantal Abu Eisheh,
Hébron, le 30 novembre 2005